Une sirène chez les hommes, un conte sombre et empli de mystère

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Une sirène chez les hommes de Mimei Ogawa et Komako Sakai (L’École des Loisirs, 2009)

Je continue sur ma lancée des chroniques d’albums ayant trait de près ou de loin au Japon avec un ouvrage illustré par la grande Komako Sakai, reconnue en France grâce à ses publications chez L’École des Loisirs.
Parmi les quelques titres de sa bibliographie que j’ai pu découvrir lors de mes recherches, Une sirène chez les hommes de Mimei Ogawa (un texte qui date des années 20 !) est vite devenu un petit coup de cœur. Parce que ça parle de sirène, oui, mais pas que ! Je tiens à vous prévenir, il s’agit d’un album un peu étrange…

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© Komako Sakai (2002)

Le texte aux allures de conte ne s’embarrasse pas d’un « il était une fois » et commence sans préambule par une belle description contemplative de l’océan et de ses alentours, ce qui instaure d’emblée un certain mystère.

Si les aspirations de la sirène, qui souhaite mettre au monde son enfant sur la terre, font écho à celles de l’héroïne bien connue d’Andersen, le message délivré par l’histoire insiste quant à lui sur la désillusion à laquelle les deux personnages, mère et fille, font face : les hommes ne sont pas aussi bons et généreux qu’on pourrait le penser…
Et même si la finalité du récit n’est pas dramatique, il ne s’agit pas pour autant d’un happy ending en fanfare comme c’est le cas en général. Mais je n’en dis pas plus, pour vous donner aussi envie de découvrir cette histoire.

Par ailleurs, malgré le petit format du livre et contrairement aux autres titres de l’illustratrice, le texte de cet album est très fourni et rejoint même presque la longueur d’un livre de première lecture.

Au premier abord, le style graphique de Komako Sakai peut surprendre, surtout dans cet album où la palette de couleurs utilisée est très (très) sombre par rapport à ses autres ouvrages. L’illustration de première de couverture n’est d’ailleurs pas des plus engageantes, il faut l’avouer.

Cependant, c’est justement ce qui est véritablement fascinant et qui m’a plu dans ce livre. La seule touche de couleur chaude contenue dans les illustrations provient du rouge des bougies peintes par la fillette sirène. D’ailleurs le titre original, Akai rôsoku to ningyô, signifie « La sirène et les bougies rouges » (titre complètement remanié pour l’édition française).
Le noir, le gris, le blanc et le bleu clair dominent les pages et ajoutent à la dimension mystérieuse du récit, donnant à voir un milieu sous-marin presque effrayant au sein duquel se meuvent créatures diaphanes et étranges poissons des profondeurs.

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© Komako Sakai (2002)

Autre particularité du style de Sakai-san, la matérialité qu’elle confère à ses illustrations. Le tout ressemble à un mélange du plus bel effet entre de la peinture, du pastel et de la craie, tout en participant à l’installation page après page de cette atmosphère étonnante.

Ce petit conte, qui sort donc quelque peu des sentiers battus, offre une expérience de lecture singulière à laquelle je vous convie vivement.

Et si vous l’avez lu et aimé, ou bien si vous souhaitez avoir un petit aperçu du travail de Komako Sakai, voici quelques autres des ouvrages qu’elle a illustré, nettement moins sombres et énigmatiques :

 

 

J’ai eu l’occasion de lire Jour de neige et La fée des renards, tous deux fort mignons, mais qui ne m’ont pas autant marquée que cette réalisation insolite qu’est Une sirène chez les hommes.

J’espère que cette chronique vous aura donné envie de découvrir les livres de Komako Sakai, si vous ne la connaissiez pas encore !
N’hésitez pas à partager vos impressions en commentaire, je serai curieuse de savoir ce que vous penser de cet album atypique !


11 réflexions sur “Une sirène chez les hommes, un conte sombre et empli de mystère

  1. Très joli article sur un très joli album! j’ai découvert qu’un court métrage de cette histoire existait, la sirène et les bougies rouges, par Shishiro Kobayashi, et avait été projeté pendant Japan Expo en juillet dernier… Je regrette de ne pas avoir pu le voir et découvrir une autre vision de ce beau et triste conte! Je vais bientôt écrire une critique de ce livre sur mon propre blog dont le sujet est les sirènes…
    Quand je l’avais lu, je ne savais rien de l’histoire et j’avais été surprise par l’amertume du texte, et le fait qu’il se trouve en littérature jeunesse! Mais les dessin de Komako Sakaï m’ont énormément plu par leur délicatesse, je n’avais par contre pas du tout été gênée par leur palette de couleur réduite et leur tonalité sombre…
    Bonne continuation!

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    1. C’est vrai !? J’aimerais beaucoup voir ce court-métrage mais je doute qu’il soit disponible sur internet… Enfin, je chercherai quand même, on ne sait jamais ^^
      Tout à fait, ce texte m’a fait le même effet quand je l’ai découvert ! Disons que pour les illustrations, c’est tout de même différent de ce qu’elle a l’habitude de faire, mais ça s’accorde parfaitement au texte et cela participe au fait que cet album me fascine. J’aimerais beaucoup qu’elle soit invitée au SLPJ un jour, pour la rencontrer…
      Je suis allée voir ton blog sur les sirènes, j’adore le concept ! Je prendrai le temps de le parcourir 🙂
      Si tu t’intéresses aux sirènes marines en littérature de jeunesse, je te conseille vivement la série littéraire créée par Jessica et Chris Sanders, « Rescue Sirens » ! Il y a pour l’instant un premier tome, et ils ont sorti un album jeunesse, mais ces livres ne sont malheureusement pas (encore?) traduits en français par contre… C’est vraiment un univers très chouette ! Et sur leur blog, il y a des articles sur la créature sirène en tant que tel, et des réflexions sur l’origine marine de l’homme… : https://www.rescuesirens.com/blogs/news

      Merci beaucoup d’être passée sur le blog en tout cas 🙂

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  2. Bonsoir, merci pour la réponse détaillée, c’est très gentil à toi!
    Malheureusement ce court-métrage ne semble pas dispo sur internet, j’ai cherché avec le titre original mais rien trouvé de probant… dommage mais peut-être un responsable de catalogue de dessin animé en France tombera dessus un jour et en achètera les droits?
    Pour les sirènes je m’y intéresse sous toutes les formes (c’est dire si c’est vaste!), y compris littérature jeunesse. Merci du conseil sur rescue sirens, même si j’ai la flemme de l’anglophonie ^^;;;

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    1. C’est dommage pour le court métrage :/
      Mais je garde cette info en tête au cas où 🙂

      Oh mais non il ne faut pas avoir la flemme ! Cette série est vraiment bien > < J'espère qu'un jour elle sera traduite en français pour que tu puisses la lire 🙂

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